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Un monde oublié

Scénariste

Corbeyran

Déssinateur

Gabor

Coloriste

Hiroyuki Oshima

Edition

Glénat

Date de sortie

16 août 2023

chroniques monde oubliés couverture
chroniques monde oubliés 1

Perdus au cœur des montagnes froides, deux hommes découvrent une étrange missive dans une bouteille à la mer. L’un d’eux est sans doute Burroughs. C’est l’histoire de Bowen Tyler, en route pour la France, en compagnie de ses frères d’armes pour combattre l’ennemi en cette aube de 1914. Il fait la connaissance, sur le navire, de la douce Lys, qui ne le laisse pas indifférent. Suite à l’attaque d’un sous-marin allemand, ils s’emparent du submersible pour sauver leurs compagnons. Dans un premier temps, ils errent dans le grand océan suite à quelques sabotages. Leur errance maritime finit par les conduire sur une île, un continent perdu au cœur du Groenland. Ils accostent en quête d’eau douce dans un univers oublié par le temps. Les dinosaures règnent en maîtres, et d’étranges créatures les attaquent, singes, hommes de Néandertal et autres. Abandonnés sur cette terre isolée, ils devront faire face à l’impossible pour survivre. Bowen partira à la recherche de Lys, capturée par ces êtres primitifs. Ils ignorent que le pire est encore à venir.

La deuxième adaptation de l’univers d’Edgar Rice Burroughs paraît un peu plus naïve que le cycle de John Carter, Tarzan ou Pellucidar. Nous pensons forcément au Monde perdu de Conan Doyle, beaucoup plus complexe. On peut aussi voir l’influence de Jules Verne 20 000 lieues sous les mers et L’île mystérieuse. Est-ce l’occasion pour Burroughs de participer à sa manière à l’entrée en guerre des Etats-Unis ? Les Allemands n’auront pas le beau rôle dans l’histoire et, malgré les épreuves, le héros et sa belle finiront par triompher, comme les troupes en 1918. Dans la longue production de l’auteur, Un monde oublié paraît moins intéressant. La première partie est un récit de guerre sur lequel Corbeyran s’attarde peut-être un peu trop. La deuxième partie nous ramène à un monde figé dans le temps. Nous retrouvons les grands thèmes de l’auteur, un monde à découvrir, des peuples primitifs, une jeune héroïne et un héros, couple parfait. Corbeyran modernise l’aventure ce qui pour certains lecteurs peut paraître anachronique. Lys est bien moins passive que les femmes d’autres sagas. Elles apparaissent souvent comme des créatures faibles que le héros protège.

Il faudrait peut-être relire Edgar Rice Burroughs pour s’apercevoir que, derrière une certaine facilité d’écriture, le contenu est plus intéressant qu’il n’y parait. Il crée un genre, mélange d’exotisme, d’aventure, de territoires, aussi important que les personnages. C’est un homme de son époque qui s’inspire des dernières découvertes sur l’Evolution, imprégné de la révolution darwiniste. Il place l’homme blanc au centre de son univers, se dépassant pour accomplir sa quête. Apparait aussi l’idée du surhomme, comme chez Tarzan ou John Carter, peut-être l’ancêtre des super-héros. Je pense qu’il s’inscrit dans l’univers des pulps, souvent de western et la conquête de l’Ouest dans les débuts. Il crée un nouveau genre qui en fait le père de la science-fiction. Un monde oublié apparaît plus politique, voire de propagande que d’autres textes. Patrice Louinet, dans son dossier final, dit qu’il appartient complètement à l’époque rooseveltienne. Il déteste le communisme et fait une différence entre le peuple allemand et l’élite militaire. Gabor, pour le dessin, choisit une pagination plus classique dans l’ensemble. On sent qu’il prend plaisir, dans la seconde partie, avec ces créatures antédiluviennes et le monde à composer. La collection démarre sous de bons auspices et l’on attend le Pellucidar avec impatience.

Patrick Van Langhenhoven